Désespoir

[James Sirius Potter]

Le ciel était d’un bleu pur. Très pur. Le soleil commençait tout juste à se lever, il illuminait le parc de l’école. Poudlard. Poudlard, fière école millénaire qui se tenait toujours aussi droite, malgré toutes les épreuves traversées. Vivre dans cette école était un enchantement quotidien… Ce matin-là, tout était tranquille, des oiseaux chantaient, sifflaient, roucoulaient. Quelques fleurs pointaient le bout de leurs nez, pour capter ce beau soleil de printemps. Tout respirait la tranquillité. Pourtant, au pied d’un arbre, qui devait être centenaire, une jeune fille pleurait. De prime, on remarquait ses cheveux châtains, ondulés, son regard noisette et pétillant d’intelligence, son menton droit et volontaire et sa robe rouge et or. Rouge & Or : les couleurs de Godric Gryffondor, lointain fondateur de l’école. Pourquoi pleures-tu, jeune fille ?

Hermione pleurait, elle était amoureuse. Terriblement amoureuse. Follement amoureuse. Et pourtant elle le haïssait. Elle le haïssait, ce Ronald Weasley, qui lui avait brisé le cœur. Certes, ils n’avaient jamais échangé autre chose qu’un regard fugace et complice mais pourtant, elle sentait, ou plutôt elle avait cru sentir, qu’il y avait quelque chose entre eux. Quelque chose de plus fort que la grande amitié qui les unissait depuis bientôt 6 ans. Et pourtant elle s’était trompée. Oh, oui comme elle s’était trompé, elle pouvait bien être une jeune fille particulièrement brillante et intelligente, le délice de ses professeurs, c’était aux côtés de Lavande Brown que se pavanait Ron maintenant. Lavande Brown… Comment pouvait-on haïr ce nom à un tel point ? Alors que Lavande était encore hier, une camarade, une amie, depuis hier soir Hermione ne parvenait même plus à prononcer son nom. Elle la détestait. Et c’était peu dire. C’était à cause de Lavande qu’elle avait passé une nuit blanche, sans dormir, qu’elle s’était levé alors que le jour n’était même pas encore là et qu’elle s’était retrouvée au pied de cet arbre, près du lac, effondrée. Cet arbre, où elle s’était maintes fois assise avec ses amis abritait désormais toute sa douleur, tous ses regrets. Oh, Ron, comment as-tu pu lui faire ça ? Comment as-tu pu la toucher, l’embrasser ?

Le jour est maintenant levé, un samedi magnifique s’annonce. Les élèves de Poudlard se lèvent, s’apprêtent à aller manger dans la Grande Salle. Certains sortent même admirer ce ciel, peu courant pour un mois d’avril. Vous pouvez rire, pour vous la journée sera magnifique. Vous pouvez chanter oiseaux, pour vous c’est le printemps avant l’heure… Pour elle, c’est un enfer que cette journée. Et celle qui suivra aussi. Et après encore. Elle voudrait être morte. Hermione tente de se relever, elle n’y arrive pas. Elle glisse. Elle reste assise sous son arbre. Elle n’en bougera pas, elle n’en a plus la force. C’est le poids de l’amour, qui agit sur elle aussi sûrement qu’une masse de 100 kilos. Ou de 71, le poids de Ron… Elle l’aime et pourtant elle le hait, quel paradoxe que voilà. Quelque chose que tu aurais étudié avec attention si tu avais pu, Hermione.

Les élèves sont nombreux à sortir du château maintenant. Ils sont entre amis, il n’y a pas de cours aujourd’hui, il fait beau… Certains, même, se tiennent par la main, se chuchotent des mots doux à l’oreille, s’embrassent. Hermione ferme les yeux. Ceux-là, elle ne veut pas, elle ne peut les voir. Et pourtant comme elle les envie…Elle rouvre les yeux, une leur de détermination illumine son regard embué de larmes.

Elle va se relever, c’est alors qu’elle le voit. Ron. Celui qui hante ses pensées. Celui qui lui a préféré une autre. Il tient Lavande par la main. Ils rient. Ils se sourient. L’image même du bonheur. Sa main sur laquelle elle s’appuyait pour se relever glisse. Elle tombe. Ravagée par le chagrin. Les deux adolescents passent devant elle. Lavande fait semblant de ne pas la voir. Hermione croise un instant le regard de Ron. Qui le détourne.

Aimer c’est bien Hermione, mais être aimé en retour c’est mieux.

Tu les suis du regard. Tu ne peux pas t’en empêcher. Tu te fais mal et tu le sais, mais tu continues. Ils s’assoient au bord du lac, assez loin pour que tu ne les entendes pas, mais suffisamment près pour qui tu puisses voir tout ce qu’ils font. Elle, celle dont tu ne veux même pas prononcer le nom, est assise entre ses jambes. Lui, il joue avec ses cheveux, la caresse, l’embrasse. Qui aurait cru que Ronald Weasley, si peu attentif aux filles, pouvait se révéler un petit ami attentif. Et stupidement ridicule, tu ne peux t’empêcher de penser. Ce n’est pas le Ron que tu connais et que tu aimes Hermione.

Lavande dit quelque chose à haute voix. Tu es trop loin pour l’entendre mais tous les élèves assis au bord du lac ont entendus. Et rient. Aux éclats. Mais le ridicule ne tue pas, dit-on. Et les deux tourtereaux continuent de s’enlacer, de s’embrasser. On les regarde. On te regarde aussi Hermione. Parce que tous le monde sait que tu l’aimes, tous le monde sait que lui, il aime cette horrible petite… Les mots, tu n’arrives même plus à les trouver.

Mais un changement s’opère en toi Hermione. Tu ne vas pas laisser cette haine te ravager, détruire tout en toi. Tu vas l’utiliser, la transformer en énergie, pour le reconquérir… Car tu es toujours amoureuse, Hermione. Et que cette amourette avec cette stupide Lavande n’est qu’éphémère. Ce n’est qu’une idylle. Une façon de te faire souffrir. Eh bien, soit.

Hermione se lève, secoue sa robe pour la débarrasser des brindilles accrochées. Elle remet ses cheveux en ordre. Elle s’essuie les yeux avec un mouchoir, elle n’est pas encore assez forte pour utiliser sa magie.

Et puis elle part, sous les regards, amicaux ou moqueurs. Loin dans le ciel, le soleil, qui continue sa course interminable l’approuve. Et comme pour l’encourager, il brille un peu plus fort.

Aimer c’est bien Hermione, être aimé en retour c’est mieux.